Le fléau des rois et le premier tome de la saga Le chœur des dragons par Jenn Lyons.
Cette année il y avait deux sagas de chez Bragelonne que je voulais tester : Le dévoreur de soleil de Christopher Ruocchio (ça c’est fait) et Le chœur des dragons de Jenn Lyons. Pour cette dernière je me suis finalement lancé dans la version poche, que l’éditeur a eu la bonne idée de sortir cet été avec cette fois une vraie couverture (et pas un machin tout blanc comme le grand format). Voyons voir ce que ça donne.
Kihrin est le fils d’un ménestrel élevé dans une maison close, et accessoirement un voleur qui aime bien entrer par effraction chez les gens. Malheureusement, une de ses expéditions nocturnes tourne mal quand il est témoin d’un truc qu’il n’aurait pas du voir, et évidemment ça va lui causer quelques soucis, notamment être poursuivi par un démon, apprendre qu’il est le fils disparu d’un noble complètement sadique, et globalement se retrouver au milieu d’une histoire aux répercussions à l’échelle de l’empire qui mêle politique, prophétie, magie et dragons.
La narration de ce Fléau des rois est un peu particulière puisqu’on va suivre deux points de vue, celui de Kihrin, et celui de Kihrin. Oui, c’est la même personne, mais on suivra deux temporalités différentes qui vont s’alterner pendant les 900 pages que compte cette brique. Deux temporalités puisque l’histoire est racontée par deux personnages qui rendent compte à posteriori de tout ce qui s’est passé. Et on en remet une couche puisqu’en fait c’est un troisième personnage qui transmet ces deux témoignages en y ajoutant des notes de bas de pages pour se marrer un coup. Oui, c’est une double-Rothfusserie. Beaucoup de lecteurices ont reproché à Jenn Lyons cette structure alambiquée (dont des lecteurs aficionados de Steven Erikson, ironiquement) mais j’ai pas trouvé ça si compliqué à suivre. Non c’est l’histoire en elle-même qui est complexe, racontée linéairement ou pas, Le fléau des rois est de toutes façons une histoire tordue.
Jenn Lyons y va pas avec le dos de la cuillère pour son premier roman, on se lance dans de la fantasy vaste, dense, avec plein de personnages, de peuples, d’artefacts et de créatures magiques. Mais parce que c’était encore trop simple, les personnages ont plusieurs identités, entre les enfants perdus ou cachés, celles et ceux qui ont changé de nom volontairement, les réincarnations (hein ?) ou (cadeau bonus) ceux qui ont échangé leurs corps avec quelqu’un d’autre grâce à un artefact magique très convoité, j’étais souvent assez perdu dans tout ça. Pour moi c’est pas la structure narrative qui est complexe, c’est juste que le bouquin est un « qui est-ce ? » géant, ce qui est à double tranchant, ça peut être très ludique si on s’arme d’un stylo et d’une feuille, ou ça peut nous paumer complètement. Moi j’étais un peu entre les deux. Le minuscule arbre généalogique en fin de roman peut aider (faut-il encore le trouver avant de finir le bouquin), mais il est évidemment spoilant, et de toutes façons presque illisible sur la version poche.
Pour autant j’ai pris du plaisir à cette lecture, en acceptant de pas tout piger du premier coup, en lâchant prise, on suit finalement Kihrin de manière très fluide, ça va vite, l’écriture est simple et permet de s’immerger dans ce bordel. On est plongé dans ces histoires de nobles complètement timbrés qui complotent et se cachent des trucs tout le temps. Darzin D’mon est un salaud qu’on adore détester et globalement tous les nobles sont des manipulateurs finis. On découvre des manipulations politiques, magiques, le passé des pseudo-elfes qui se sont foutus sur la gueule, on passe des intrigues de cour aux marchés aux esclaves, puis on se retrouve séquestré par un dragon sur une île perdue avec des adorateurs de la mort. La fantasy, quoi. Le fait d’être parfois paumés nous immerge encore plus aux côtés du protagoniste qui n’y voit souvent pas beaucoup plus clair que nous. Oui, avec une narration un peu mieux dosée, plus subtile, on aurait eu un vrai chef d’œuvre, là c’est parfois un peu bourrin, maladroit, envoyé un peu n’importe comment vers les lectrices et lecteurs… Mais on finit par se prendre au jeu. Enfin, ou pas, ça dépend des gens, moi oui en tous cas, ça passe.
Je suis très curieux de voir où va cette saga de 5 tomes, si Jenn Lyons gagne un peu en maîtrise et en subtilité, on a un potentiel de fou qui se cache quelque-part là-dedans. Où alors ça peut se casser complètement la gueule, la vie est un mystère. Ah, par contre si vous croisez par hasard la citation qui orne la quatrième de couv’ « Une envergure rappelant Patrick Rothfuss et des scènes d’action à la Brandon Sanderson », oubliez-là tout de suite. Le chœur des dragons n’a rien à voir ni avec Rothfuss ni avec Sanderson, ce jeu des comparaisons fait dire vraiment n’importe quoi aux gens. Moi j’aurai envie de dire que c’est Robin Hobb après 5 ou 6 pintes de bières. Voilà, vous pouvez me citer pour votre prochaine réimpression, Bragelonne.
Lire aussi l’avis de : Lianne (De livres en livres), Sabine (Fourbis et têtologie), Les blablas de Tachan,
Couverture : Elsa Roman
Traduction : Louise Malagoli
Éditeur : Bragelonne
Nombre de pages : 912
Date de sortie : 27 Mai 2020
Prix : 30€ (broché) / 9,95€ (poche) / 5,99€ (numérique)
Je prends aussi plaisir à découvrir la saga avec sa version poche depuis plusieurs mois et je me régale.
Déjà ce n’est pas du tout ce que je pensais, erreur d’interprétation due aux couvertures blanches… Ensuite cette narration alambiquée me ravit, de même que cette histoire de Qui est-ce géant tordue comme tu dis. Heureusement que j’avais trouvé les annexes j’avoue. D’ailleurs elles seront bien utiles à chaque tome.
J’ai eu un quasi coup de coeur pour le tome 3, avec toutes les avancées et développements qu’il y a. C’est vraiment de la fantasy comme j’aime, riche, complexe, aventureuse, tordue et charismatique. Bref, j’adore ma découverte et j’espère qu’il en ira de même pour toi !
Ah chouette, tu me rassures pour la suite, j’ai acheté les deux suivants
Tu étais quand même sûre de toi pour acheter les 2 comme ça ! Bonne découverte 😀
Il me tente, il me tente ! Bon j’avoue, j’ai un peu peur de ne pas être suffisament concentrée pour réussir à suivre cette partie de qui est-ce géante. Mais je note
Faut être concentré oui !
Il me tente bien, celui-ci, tiens. En tant qu’afficionada d’Erikson, va falloir que je relève le défi \o/
Elle me fait moins peur qu’Erikson quand même XD
Curieuse d’avoir ton avis sur le second tome ;). Perso, elle m’a perdu XD.
Oui j’ai vu ça sur ta chronique ! On verra bien 🙂
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