Depuis quelques tomes, Harry fait des manières, il veut pas qu’on le foute à la retraite. Il a eu beau prolonger, râler, se rendre indispensable, maintenant ça y est, ils ont réussi à le pousser dehors. Plus d’enquête, on va regarder Motus à la télé et faire la queue à l’ouverture de la supérette.
Évidemment, ce serait mal connaitre l’inspecteur Bosch. Dans Jusqu’à l’impensable, l’avocat à la Lincoln Mickey Haller vient demander à son frangin de replonger, mais cette fois dans le camp de la défense. Haller défend un ancien biker accusé du meurtre de Lexi Parks, directrice adjointe des services municipaux de West Hollywood. Il a besoin d’aide parce que Cisco est à l’hosto après un « accident ». Harry prend le dossier sans s’engager, parce que bosser pour la défense ça lui fait un peu mal au cul quand même. Il a l’impression de trahir ses anciens collègues, mais bientôt les évènements vont le forcer à accepter l’affaire malgré ses réticences. L’ancien inspecteur va reprendre le dossier d’enquête du début, retraçant tous les pas de l’équipe d’inspecteurs pour chercher la faille et trouver si Da Quan Foster a vraiment tué cette femme.
Les habitués de la série savent à quel point le héros attache de l’importance au « Murder book », ce classeur où sont retranscrit tous les détails de l’enquête et qui tombe directement dans ses mains ici. Harry pense que la réponse est toujours dans le livre, et il a ici l’occasion de le prouver puisque ce sera pratiquement sa seule source pendant toute son enquête. C’est passionnant de le voir suivre les pas d’une enquête terminée, flairant chaque piste, vérifiant chaque détail, à l’instinct mais avec rigueur. On a des passages entiers du bouquin où Bosch se contente de lire son gros dossier, et Michael Connelly se démerde toujours pour rendre ces passages toujours accrocheurs. Il arrive à nous faire suivre le fil de la pensée de son héros de manière logique et fluide, ce dernier regarde les photos, suit le fil de l’investigation, lit des listes de témoins, des dépositions, et reconstitue le puzzle avec tout ça.
Bien sûr, de temps en temps il lève la tête de son classeur et va sur le terrain pour toquer aux portes et suivre des pistes. C’est dans ces moments-là qu’il va remuer la merde que certains voudraient laisser au repos, et s’attirer des ennuis, comme d’habitude. Jusqu’à l’impensable conserve tout ce qui fait la force de la série, une enquête précise extrêmement documentée, un rythme sans aucun temps mort (le fameux « élan » qui ne doit jamais retomber), des raisonnements complexes mais que le lecteur arrive à suivre avec une facilité déconcertante… Mais ici le changement de statut d’Harry Bosch modifie les règles du jeu, ça donne de la fraicheur et de la nouveauté à l’ensemble. Il doit bosser pour un avocat, ce qui change énormément sa manière d’enquêter, et ses priorités. Il va devoir marcher sur des œufs pour découvrir la vérité tout en gardant son intégrité d’ancien flic, pas question de tomber dans les petits jeux de Haller.
Jusqu’à l’impensable est un excellent Harry Bosch, une enquête haletante et un renouveau pour ce héros de Michael Connelly qui cherche sa place alors que le système l’a foutu sur la touche. Mais Harry s’accroche. Harry ne lâche rien.
Lire aussi : Ceux qui tombent, Mariachi Plaza, Les dieux du verdict, Le cinquième témoin, Bosch (la série),
Encore un très bon Connelly!
Ça n’arrête pas, j’ai hâte de lire le suivant !