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Harry Bosch saison 1, l’adaptation exemplaire

Bizarrement, le héros le plus emblématique de l’écrivain Michael Connelly a mis du temps à avoir un visage à l’écran. Certains de ses autres personnages ont été plus rapidement transposés à l’image, sous les traits de Clint Eastwood pour Terry McCaleb (Créance de Sang), ou encore Matthew McConaughey excellent dans le rôle de Mickey Haller (La défense Lincoln).

C’est finalement Amazon qui a fait le pari de produire une série sur Harry Bosch, et pour développer tout ça ils ont fait appel à Eric Overmyer qui avait bossé sur la quatrième saison de The Wire et sur Treme, entre autres. Y’a pire comme référence. Après une diffusion sur le site du Libraire démoniaque pour nos amis états-uniens (bloqué pour nous, pauvres habitants du vieux continent), on attendait son arrivée en France, en priant très fort et en sacrifiant des poulets Playmobil (on est pas des monstres non plus) les soirs de pleine lune. Apparemment ça a été efficace puisque c’est en ce beau mois de Mai 2016 que la première saison a été diffusée sur France 3 en prime-time. Oui, vous avez bien lu, le fief de Derrick et Barnaby accueille une série américaine moderne sur un créneau à grosse audience. Pour une fois, j’me dis que ma redevance a été bien utilisée.

bosch-amazon-studiosPour donner vie à Harry Bosch, il fallait pas se louper, il fallait un acteur qui en impose et qui colle avec ce personnage que des millions de lecteurs connaissent déjà très bien après une bonne vingtaine de romans. Plutôt que de tabler sur une star bien « bankable », on est surpris de voir débarquer Titus Welliver, le genre d’acteur abonné aux seconds rôles, dont on connait la tête sans se rappeler où on l’a déjà vu. Voilà, Harry a un visage, on peut découvrir cette première saison de 10 épisodes. Celle-ci se base principalement sur trois romans : La blonde en béton (au début) mais surtout Wonderland Avenue et Echo Park desquels elle va habilement mêler les intrigues.

On fait la connaissance d’Harry alors qu’il comparait au tribunal pour avoir tué un suspect alors qu’ils était seuls dans une ruelle. Mais Notre bon vieux Hieronymus a autre chose à faire que de défiler devant le juge, on vient de retrouver les ossements d’un enfant dans les collines d’Hollywood et l’enquête doit commencer au plus vite, le voilà donc à jongler entre ses différentes préoccupations et l’inspecteur n’est pas du genre à faire les choses à moitié. L’enquête va se compliquer lorsque des officiers en patrouille arrêtent un homme qui se trimballait avec un cadavre à l’arrière de son van, les deux histoires pouvant être liées. Et ce n’est que le début, Bosch s’amuse à multiplier les pistes et les sous-intrigues en gardant toujours la maitrise narrative de l’ensemble, c’est complexe mais clair, une leçon d’écriture servie par des dialogues au poil.

Si le début de la série nous laisse entrevoir un énième personnage de flic qui frôle les limites de la légalité sans sourciller, on comprends assez vite qu’il n’en est rien : Non, Bosch n’est pas un flic borderline pourri qui se met le règlement derrière l’oreille quand ça l’arrange, comme le laisse entendre la promo de la série. C’est un enquêteur intègre jusqu’au bout (voire au-delà) qui ne lâche jamais rien, qui envoie valser ses supérieurs et leurs manœuvres politiques quand elles sont absurdes au point de l’empêcher de faire son job. Sa seule obsession est de boucler ses affaires et de livrer les coupables à la justice.

C’est un réel plaisir de voir l’univers de Michael Connelly prendre corps à l’écran avec autant de maitrise. Welliver nous propose un jeu tout en intensité retenue, même si on pouvait imaginer l’enquêteur différent (chacun s’en faisait évidemment sa petite image personnelle), il faut reconnaitre qu’il est parfait pour ce rôle et fait honneur au modèle littéraire. Le reste du casting est excellent également, Jamie Hector impressionne par sa calme présence dans le rôle de Jerry Edgar, coéquipier fiable et compétent. Lance Reddick nous ressort sa composition de supérieur indéchiffrable tout droit venu de The Wire ou Fringe, Annie Wersching est parfaite en rookie aux dents longues, etc… Je vais pas vous faire tout le monde mais on sent un réel soin apporté au casting pour rendre tout l’univers de Bosch entier et cohérent.

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Car c’est ça qui fonctionne extrêmement bien dans la série, Harry est livré avec tout son entourage et son univers, le milieu policier est décrit avec une précision et un réalisme qui donne du corps à l’ensemble. On est loin des super-flics fantasmés par la télé et c’est en ce sens qu’on peut rapprocher Bosch de The Wire : Les enquêtes sont lentes et laborieuses, pleines de procédures et de politique, de farfouillage de dossiers, etc… Chaque coup de feu tiré amène une contre-enquête du FID et des rapports en pagaille. La série prend son temps, 10 épisodes pour résoudre cette double enquête, on oublie ce modèle hollywoodien du « 1 épisode = 1 meurtre » pour livrer une histoire moins simpliste et prendre le temps de poser des bases solides. On peut aussi citer The Killing en exemple de cette tendance à la lenteur dans le polar, une autre série à découvrir absolument si vous ne connaissez pas.

L’ambiance générale est au polar noir classique extrêmement bien posé, la ville de Los Angeles permet de jongler entre ses environnements très urbains et ses collines boisées grillées par le soleil californien. La réalisation utilise très bien le goût du héros pour le jazz et l’intègre à son habillage sonore, collant au rythme posé et aux panoramas citadins nocturnes constellés de lumières artificielles. Le seul défaut que j’ai trouvé à la série est la conclusion de l’enquête Waits archi-classique, un peu expédiée à la fin de l’épisode 9. Mais l’épisode 10 en forme d’épilogue planant remet tout en perspective et conclut cette première saison avec tout ce qui en a fait la beauté. J’attendrai avec impatience la seconde saison, en espérant que France 3 est assez satisfait de son pari pour enchainer dès que possible.

Lire aussi l’avis de : Nicolas Laquerrière (Chro), Herve Aubert (cineseries-mag),

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Cet article a 4 commentaires

  1. gibrat

    Tout à fait d’accord avec toi. Une bonne adaptation : j’aurais préféré un acteur plus « tough guy » pour Harry B., comme Kiefer Sutherland, par exemple… Tous les autres sont parfaits, mais lui fait parfois un peu « mou »…
    La maison également est époustouflante !

    On attend quand même les autres saisons avec impatience !

    Tu peux acheter le dernier Connelly, il est excellent et clôt la série avec brio…

    1. Lequel ? Mariachi Plazza ? J’ai encore « ceux qui tombent » à lire avant mais Mariachi ne clôt pas la série à priori vu qu’il y a The crossing qui suit et The Wrong Side of Goodbye est annoncé pour Novembre.

      (bon, j’espère juste que c’était pas un gros spoil 😀 )

      La maison d’Harry est tout à fait comme je l’imaginais, impressionnante avec son panorama

  2. Jean

    Oui, c’est Mariachi Plaza. Il clôt en tout cas, la série Bosch…