Moi quand je lis l’histoire d’un assassin à capuche dans un environnement typé « renaissance italienne », évidemment mon petit cerveau va faire le rapprochement avec Ezzio d’Assassin’s creed… Mais comme mon titre le fait si subtilement remarquer, Gagner la guerre ne raconte pas l’histoire d’un jeune gentilhomme au grand cœur, non… Benvenuto Gesufal est une racaille, un produit des bas-quartiers de Ciudalia, un tueur pur jus sans trop de morale.
Nous faisons la connaissance de ce doux énergumène sur un navire, Ciudalia vient d’écraser la flotte de Ressine et les dernières escarmouches navales mettent un point final à cette guerre. Mais Benvenuto n’est pas là pour taper du vaincu, son patron est un des hommes politiques influents de Ciudalia et considère que la victoire serait plus profitable avec moins de confrères politiciens, donc notre homme va sortir ses balais aiguisés pour faire du ménage et négocier quelques avantages avec l’ennemi, ni vu ni connu. Bon, tout ne se passe pas exactement comme prévu et notre ami y perd quelques plumes, et le voilà trimballé de tous les côtés de l’échiquier politique, atout maître ou fusible encombrant, il va devoir la jouer fine pour se sortir de ce merdier.
Gagner la guerre parle beaucoup de politique, une politique bien manipulatrice et perverse. Le livre et d’une efficacité redoutable de ce côté-là, la partition est précise et surprend le lecteur, les personnages trahissent, tuent, et le plateau de jeu change sans cesse. Mais cette histoire nous est racontée du point de vue de Benvenuto, à la première personne, le ton du récit est vraiment agréable grâce à ça, l’homme a un langage fleuri absolument délicieux et un humour noir très appréciable. Le ton du livre est une autre de ses grandes qualités et on a vraiment l’impression de papoter avec un tueur froid, calculateur, mais plein d’esprit et d’humour tranchant.
La contre-partie qui m’a quelque peu fait sortir du récit, c’est qu’il provoque rarement une vraie empathie avec le lecteur car c’est effectivement un beau salaud. Alors oui, c’est du coup très réaliste et cohérent avec le personnage mais je me suis moins impliqué dans son aventure, je suis resté un peu en retrait niveau immersion, notamment après une certaine scène un peu borderline niveau moral avec une certaine demoiselle (tous ceux qui ont lu le livre sauront de laquelle je parle).
Mais malgré quelques longueurs, l’intrigue est très bien ficelée et rythmée par des scènes d’action vraiment pêchues. Certaines de ces scènes m’ont effectivement rappelé des passages types d’Assassin’s Creed car tel Ezzio, notre tueur fuit par les toits en jouant les yamakazis, profite d’une bataille rangée pour poignarder sa cible, s’attaque seul à une maison sur-protégée, se faufile dans des bâtiments en glissant parmi les ombres… On a à peu près tous les moments-clés typiques des tueurs à capuche qu’on connait bien, mais fort heureusement c’est ici très bien exécuté.
Gagner la guerre est un bonne histoire d’aventure, de complots et d’action, à la construction remarquable et au ton délicieusement cynique mais qui pour moi loupe l’excellence à cause de la froideur générale que j’ai ressenti à sa lecture, sans doute à cause de ce héros détestable mais Jean-Philippe Jaworski l’a écrit spécifiquement comme ça, je vais pas le lui reprocher, c’est juste que j’accroche moins à ce genre de héros personnellement.