Un bon indien est un indien mort est un roman de Stephen Graham Jones précédé d’une belle réputation, mais il a aussi un titre capable de vous faire strike automatiquement sur certains réseaux sociaux, et ça c’est déjà rigolo. Mais sinon, à part ça, ça raconte quoi ? On va voir ça, en tous cas y’a des indiens morts.
Quatre amis d’enfance, amérindiens ayant grandi dans la même réserve, ont un jour tué des caribous sur les terres des anciens, dont une femelle particulièrement vénère. Des années plus tard, chacun fait sa vie mais ils sont encore hantés par cette dame Caribou, des visions, des incidents, des drames vont s’accumuler et ça va partir en vrille.
On suivra tour à tour chacun de ces potes dans leur vie d’adulte plus quelques autres points de vue bonus, on assistera à l’horreur implacable qui va faire basculer leur vie et celle de leur entourage. Parfois une perspective va prendre un chapitre de quelques pages (Ricky), parfois une moitié de bouquin (Lewis), mais le roman est dans tous les cas une plongée dans la folie dans un contexte social déjà violent. Stephen Graham Jones va profiter de ce roman pour nous dépeindre la vie d’une génération de natifs américains un peu paumée, entre des traditions qui ont perdu de leur sens, le racisme bien violent et l’ennui. Le côté social de ce roman horrifique est percutant, l’auteur dresse un portrait dur et sans concession de la situation des peuples natifs aux États-Unis, c’est violent, c’est commun, c’est mortel, cet aspect est une des grandes réussites du roman pour moi.
Et à côté de ça, l’horreur psychologique va aller assez loin, on va plonger dans la tête de personnages qui vont partir un peu dans tous les sens, sans savoir s’ils deviennent fous où si il se passe vraiment des trucs pas nets. On n’est jamais très sûr de ce qui se passe, l’auteur joue sur cette ambiguïté pour installer la paranoïa, le malaise, et dévoiler les choses au fur et à mesure. Pour cette raison (je suppose), on a un texte qui part un peu dans tous les sens, la narration digresse sans arrêt au point que j’ai trouvé ça difficile voire pénible à suivre et ça m’a sorti régulièrement de l’histoire.
L’ambiance posée par le roman est réussie, on a des scènes vraiment choc, Stephen Graham Jones y va pas avec le dos de la cuillère. Pourtant le reste m’a vite ennuyé, j’ai pas eu beaucoup d’empathie pour les protagonistes, ils subissent mais réagissent assez peu, on a un jeu de massacre qui prend une grosse partie du livre mais faut attendre la fin pour comprendre (et encore) et avoir un semblant de réaction. C’est très personnel et les autres lecteurices l’ont sûrement pas pris comme ça, mais la fin de la partie de Lewis m’a semblé si bête que ça m’a sorti du truc. Arrivé à la seconde moitié j’étais plus dedans, j’en avais un peu marre de voir des gars rien comprendre à ce qui leur arrive et faire n’importe quoi, et si l’arrivée de Denorah sert de bascule, c’était un peu tard pour moi.
Un rendez-vous manqué donc, Un bon indien est un indien mort est à la fois un roman d’horreur et un portrait social, et si le second aspect est réussi, le premier m’a laissé de marbre. C’est dommage parce que j’en attendais beaucoup, mais tant pis, ça arrive.
Lire aussi l’avis de : Stéphanie Chaptal (De l’autre côté des livres), Marc (Les chroniques du chroniqueur),
Couverture : Kaiwan Shaban
Traduction : Jean Esch
Éditeur : Rivages/Noir
Nombre de pages : 352
Sortie : 21 Septembre 2022
Prix : 23€ (broché) / 16,99€ (numérique)
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