Oui, parfois, je lis autre chose que de la fantasy, et ça faisait un moment que Catriona Ward était quelque part sur mes radars sans que je sache trop vraiment à quoi m’attendre. Du thriller, de l’horreur, du fantastique, je sais pas… Oh ben tiens, y’a La dernière maison avant les bois qui existe en VF, testons.
Ted Bannerman est un type chelou qui vit dans la dernière maison de Needless Street, juste avant la forêt. Il a barricadé ses fenêtres, il entretient pas son jardin, il s’occupe un peu de sa chatte Olivia, un peu de sa fille Lauren quand elle est là, il picole un peu beaucoup. Ted a aussi un secret, voire plein de secrets, mais quand Dee emménage dans la maison d’à côté, c’est pour enquêter : Ted est sûrement celui qui a enlevé sa petite sœur Lulu près du lac il y a onze ans, et elle compte bien le prouver.
On suivra pas mal le point de vue assez particulier de Ted dans ce roman, mais aussi celui d’Olivia, oui, Olivia la chatte, et ça c’est déjà un argument de vente pour beaucoup. Ted est un archétype de gros dégueu chelou, il picole, vit en ermite, il mange n’importe quoi, sa maison est en bordel, il est pas du genre sportif et trimballe sa grosse carcasse du canapé au supermarché pour refaire son stock de bière avant de regarder des monster trucks. Et son point de vue nous montre bien tout ça, Ted est pas une lumière.
La dernière maison avant les bois a été une belle surprise pour moi, mais la surprise était cachée sous une autre surprise derrière un tas de clichés. Parce que pendant une bonne partie du bouquin on a entre les mains un truc assez classique, glauque, une disparition d’enfant, un suspect, une ambiance bien mystérieuse. On sait pas trop si y’a du surnaturel ou pas là-dedans. Je me disais que c’était bien exécuté mais j’avais déjà lu ça mille fois dans ma période « thriller / horreur » y’a 20 ans. Non mais ho, on me la fait pas à moi. Ah ben apparemment si, on me la fait. Parce que ce roman cache bien son jeu, mais surtout, Catriona Ward a un truc à nous dire. Et un thriller glauque avec un propos de fond construit et intelligent, de cette manière-là, on en a pas beaucoup.
Mais c’est difficile de vous parler de ce bouquin parce que trop en dire serait le gâcher, donc je vais vous laisser découvrir où l’autrice veut nous amener par vous-même et ne pas vous livrer d’analyse de ce propos, vous êtes de grandes personnes, vous saurez faire ça sans moi. Sachez que Catriona Ward joue avec nous, avec nos conceptions de ce qu’est une histoire de ce genre, avec nos attentes et les clichés qu’on a intégrés à travers nos livres et nos films. Je suis d’ailleurs tenté de vous balancer un film très bon auquel ce bouquin m’a fait penser, mais ça vous donnerait déjà trop d’indices. Alors là oui, comme je vous l’ai dit, vous vous attendez à thriller avec un twist. Mais vous êtes loin du compte. Après s’être tranquillement installé, ce roman va vous retourner une fois, puis vous allez vous dire « ah oui OK » ou « ah ben je l’ai trop vu venir celui-là » mais en fait non, pas OK, t’as rien vu et c’est parti pour les montagnes russes.
On pourra trouver la fin un peu rapide, qu’on glisse quelques trucs sous le tapis en cours de route, mais Une dernière maison avant les bois est une lecture étonnante qui nous parle de douleur et d’empathie dans une histoire cruelle, avec un talent certain pour installer son ambiance et ses pièges en cours de route. Voilà donc une belle découverte à partager. Sans trop en dire.
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Couverture : Rémi Pépin, Tuomas A. Lehtinen, stock d’images
Traduction : Pierre Szczeciner
Éditeur : Sonatine
Nombre de pages : 416
Date de sortie : 16 Février 2023
Prix : 23€ (broché) / 15,99€ (numérique) / 8,30€ (poche à paraître)