Après nous avoir présenté sa nouvelle héroïne dans En attendant le jour, Michael Connelly nous offre avec Nuit sombre et sacrée le duo inévitable, l’enquête qui fait se rencontrer les deux générations d’inspecteurs. Attachez vos ceintures, Renée Ballard et Harry Bosch vont se rencontrer.
Pendant son service de nuit, Renée Ballard tombe sur un vieux con en train de farfouiller dans les dossiers de son service. Il a clairement pas le droit d’être là, donc Renée le confronte et se renseigne sur le bonhomme. Elle découvre que c’est un certain Harry Bosch, et qu’il bosse sur une affaire non classée qui traine depuis des années, le meurtre d’une adolescente, Daisy Clayton. Intriguée, Renée décide de suivre l’affaire. Mais Harry a encore du boulot « officiel » dans son service du San Fernando Police Department et il doit faire face à des histoires de gang qui ne lui laissent pas beaucoup de temps.
Ah ben voilà, ça devient une habitude donc, après Une vérité à deux visages, voilà un nouveau roman de Michael Connelly qui arrive en France après la saison de Bosch dont il est adapté. On a déjà assisté à la résolution du meurtre de Daisy Clayton dans la saison 6 de la série, mais fort heureusement, le contexte de cette enquête n’est pas du tout le même, réservant quelques surprises au lecteur assidu. Ballard n’existe pas dans la série, donc le déroulement de l’enquête est complétement différend. Ici, l’auteur alterne les points de vue entre Bosch et Ballard pour donner du rythme et répartir les découvertes entre les deux enquêteurs, et ça ajoute encore du suspense quand les deux doivent se synchroniser. Cette nouveauté apporte beaucoup, et quand l’un des deux est dans de sales draps, on ne décroche plus du roman.
On garde les qualités du travail de Michael Connelly dans ce nouveau roman, évidemment, on a une enquête très précise et détaillée, un univers policier crédible, extrêmement documenté (plus que tout autre auteur que j’ai pu lire en tous cas). Mais à travers son personnage féminin, l’auteur aborde un aspect que pouvait difficilement incarner Bosch. Le regard de Ballard apporte le point de vue de femme qui passe au-dessus de beaucoup d’hommes dans une enquête, et doit aussi supporter le paternalisme sexiste de certains, ainsi que l’affaire de harcèlement qui l’a fait atterrir au service de nuit dont personne ne veut. Connelly attaque frontalement les problématiques MeToo et le sexisme, pas toujours avec une grande subtilité, mais ça donne pas mal de bagage à son héroïne (une intervention sur une histoire de viol va peut-être faire grincer quelques dents). Nous avons donc toujours un roman qui dépote et qui reste fidèle à la qualité à laquelle nous a habitué l’auteur au fil des années. Mais petit à petit, j’ai de plus en plus de problèmes avec la traduction.
Quand on lit un Michael Connelly en français, on a souvent des tournures de phrases qui font tiquer un peu, qui sonnent pas juste font lever un sourcil mais jusque-là j’étais passé outre, porté par le rythme des enquêtes et la personnalité de l’écrivain. Mais soit parce que j’étais particulièrement attentif cette fois, soit parce que celui-ci était particulièrement gratiné, je suis tombé sur quelques perles de traduction foireuse que même google ne fait plus, comme « L’école des sciences de l’ordinateur » ou « Une question restée pendante », parmi tant d’autres. Alors c’est pas la première fois qu’un traducteur fait de la merde dans le genre, mais ce qui est rigolo c’est que le traducteur de Connelly est Robert Pépin, un gars assez influent pour avoir sa collection « Robert Pépin présente… » chez Calmann-lévy avec son nom en gros au dos du bouquin. Ça serait donc sympa qu’il nous torche pas ses traductions à l’arrache et que l’éditeur relise un peu tout ça, merci.
Mais pour autant, le roman reste efficace et fidèle à la réputation de l’écrivain. Il marque un tournant dans son univers, même si on se demande encore combien de temps Bosch va encore trainer sa carcasse de retraité sur les scènes de crime, à un moment va falloir se reposer Harry !
Oh ça m’intéresse bien ça, j’ai lu une ou deux enquêtes de Harry Bosch, mais les thématiques qu’il aborde à travers son enquêtrice m’ont l’air bien intéressantes. Merci pour la découverte !
Complètement d’accord avec vos réserves concernant la traduction. J’y ajouterais les erreurs énormes (confondre accusation et défense dans un précédent roman), les phrases qu’on relit plusieurs fois, y compris à voix haute pour tenter de les comprendre et celles qui en français disent l’exact contraire de ce qu’elles sont supposées dire. Ça fait beaucoup et à mon sens, traduit un manque de respect total tant de l’auteur que des lecteurs-trices.
Tout à fait d’accord au sujet de Robert Pépin : j’ai vraiment du mal à le lire, je me suis même demandé s’il était français tellement c’est mal rédigé parfois, je vais donc arrêter de lire Connelly, tant pis.
Merci pour votre remarque sur la traduction. Je fais le même constat. Je viens de terminer Les ténèbres et la nuit et à un moment, on peut lire « la chambre du maître » pour la chambre principale, erreur, je suppose, de la traduction de master bedroom qui désigne la chambre principale ou parentale. Je viens de tester : google ne fait pas lui-même cette erreur. Ironie de l’histoire, la dédicace de cet ouvrage est pour Robert Pépin le traducteur que l’auteur appelle son ami…