Bradley P. Beaulieu nous replonge dans son monde aux influences arabes avec Le sang sur le sable, second tome de Sharakhaï, paré d’une magnifique couverture de Marc Simonetti, j’avais hâte de replonger au cœur de la cité aux douze rois.
Le deuxième livre fait directement suite aux Douze rois de Sharakhaï, Çeda est maintenant une Vierge du sabre et sert les rois qu’elle a juré de détruire. Mais ce rapprochement lui permettra d’en apprendre plus sur ses origines et ce qui se trame dans les palais de la ville. On suit ses aventures au sein de sa main (une escouade de cinq vierges) qui parcourt le désert pour le compte d’un des rois. Elle joue donc les agents infiltrés et va se retrouver face à ses anciens alliés chez qui une lutte de pouvoir se met en place avec l’arrivée du mage Hamzakiir (qui fait des trucs un peu dégueu pour arriver à ses fins). Çeda va donc s’éloigner d’Emre mais elle a ses propres démons à combattre vu que son lien avec les Asirims se renforce, elle a du mal à contenir leur rage.
Ce second tome est long et dense, et change de point de vue régulièrement pour nous faire voir tous les camps en présence. On suivra évidemment Çeda, mais aussi Emre chez les Hôtes sans lune ou encore Davud qui est devenu érudit au collegium, chacun avec ses propres enjeux. On va même zyeuter ce qui se passe dans le palais des rois, parce que ça complote là-haut aussi ! Bradley Beaulieu consacre ce second tome à nous faire voir toutes les nuances de gris de son univers, il nous attache aux vierges pour nous montrer que tout n’est pas pourri du côté des rois, et place un peu de pourriture chez la résistance pour contre-balancer. Dans le sang sur le sable, il ne faut jamais se fier aux apparences et les personnages se débattent dans des intrigues qui les dépassent largement. On explore les zones d’ombres du passé autant que les secrets du présent tout en remuant beaucoup de merde qui était ensevelie.
Le sang sur le sable fait souvent penser aux films de gangsters, avec évidemment Çeda qui joue les « agents infiltrés », ce qui l’amène à avoir les interrogations et les doutes qu’on voit dans ce genre de pitch scorcesien. Mais on a aussi les hôtes sans lune qui ont un petit côté mafieux, avec leurs guéguerres internes, les rivalités entre chefs, etc… Tout ça constitue une trame très complexe de politique, manœuvres, trahisons et mensonges. Mais peut-être trop complexe pour moi, car si tout est très solidement construit, j’ai un peu perdu de vue les personnages au milieu des rouages de cette grande machinerie précise. Le background qui se reconstruit au fil de la lecture est impressionnant de maîtrise, les secrets se dévoilent les uns après les autres et tout fait sens, mais les changements de point de vues et le rythme des révélations m’ont empêché de m’attacher aux personnages autant que j’avais pu le faire dans le tome précédent, et c’est en général ce que je privilégie dans mes lectures.
Çeda en particulier a l’air de naviguer à vue ici, elle s’est engagée dans les Vierges du sabre pour se rapprocher de ses cibles mais on la sent paumée, elle se laisse ballotter par les événements et on a perdu la détermination qui la poussait. En plus elle subit l’influence des Asirims qui lui font perdre la boule dans des crises de fureur incontrôlable. Emre est maintenant dans le camp d’en face mais reste assez éloigné de nous pendant une grosse partie du livre, pareil pour Davud qui ne fait un coucou que pour être emporté dans un tourbillon d’emmerdes plus tard. Mon avis un peu mitigé vient de mes goûts, je préfère une trame simple qui m’attache à ses personnages qu’un monde très complexe qui me les fait perdre de vue, et c’est ce qu’on a ici, aussi brillante soit la construction.
Le rythme aussi a pris un coup dans les gencives, Beaulieu doit mettre tellement d’efforts dans la mise en place de sa grosse machine infernale qu’il prend son temps pour tout faire rentrer dans notre cerveau, et parfois ça rame énormément ! Fort heureusement, il y a un aspect que l’auteur conserve avec brio, c’est l’ambiance et l’immersion par les détails. Cet univers aux saveurs orientales est toujours décrit avec le plus grand soin par des petites touches, des odeurs, des descriptions qui nous plongent dans cette ambiance magnifique. Le dépaysement est toujours le bienvenu et c’est encore une fois une réussite qui nous change des influences médiévales européennes que la fantasy se plaît à ressortir tout le temps.
En conclusion, Le sang sur le sable est une suite qui passe à la vitesse supérieure sur son univers complexe, toujours avec maîtrise mais il perd un peu de cœur au passage. Ce qui n’en fait pas un mauvais roman, ça reste un incroyable voyage dans un univers dépaysant, mais m’a moins emporté.
Lire aussi l’avis de : Apophis (le culte d’Apophis),
On est d’accord sur le fait que les deux tomes sont intéressants, mais pour ma part, je trouve que le 2 l’est plus que le 1. Belle critique en tout cas 🙂
Oui, c’est pour ça que j’essaye d’expliquer ce qui m’a freiné sans pour autant descendre le livre, c’est objectivement une bonne suite, mais j’ai moins accroché
C’est bizarre mais en lisant ton résumé j’ai trouvé que ça ressemblait comme évolution à la trilogie des magiciens noirs de Canavan. Dans le sens ou dans le premier l’héroïne se découvre des pouvoirs (ici c’est plus son sang) et dans le second elle se retrouve donc de l’autre coté qu’elle pensait maléfique et se pose plein de questions xD
Même si on est d’accord que ça n’a rien à voir sur tout le reste 😛
Bref je ne l’ai pas encore lu parce que je l’ai demandé dans ma liste de noel (et que je l’aurais surement) du coup je survole le reste de la chronique pour l’instant pour ne pas trop en savoir plus ^^
Il est dans ma PAL celui-ci ! Le rythme est assez lent, mais ça ne me gêne pas.