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Vostok, la classe de neige hardcore

Vostok est une base de recherche russe mise en place en 1957 au beau milieu de l’Antarctique. Pas vraiment idéal pour les vacances (les températures atteignent -90°C en hiver) le lieu a quand même l’avantage de permettre des recherches scientifiques poussées, par exemple en forant ses 3500 mètres de glace ou en étudiant les champs magnétiques du pôle sud.

Et là je vous parle pas du roman de Laurent Kloetzer, pas encore, non. Ça c’est la vraie vie, une station scientifique mise en place par l’URSS en pleine guerre froide, l’époque où les plus grandes puissances mondiales se tiraient la bourre sur absolument tous les domaines, y compris la science, sans se préoccuper des coûts ou de la rentabilité. C’était la recherche pour le prestige de la découverte, la fierté du défi relevé, le plaisir d’y arriver avant celui d’en face pour la grandeur de sa nation. C’est ce cadre-là que prend Laurent Kloetzer dans son roman Vostok, paru aux éditions Denoël (collection Lunes d’encre), vous voyez, on y vient.

Pourtant l’histoire du dit bouquin ne commence pas directement sur la glace, mais au Chili dans un futur pas très éloigné. Choc thermique pour le lecteur qui avait déjà enfilé sa doudoune. On va y faire la connaissance de Leonora, petite sœur de Juan, un caïd du Cartel. L’adolescente est plus ou moins emprisonnée dans la maison de son frangin en compagnie de son équipe, pour la protéger de leurs rivaux les Andins. Mais Juan a une chance de prendre l’avantage sur l’ennemi, de pénétrer leur système, mais pour ça il doit se rendre en Antarctique et découvrir le secret de Vostok, en ramener la clé. C’est ainsi que démarre l’expédition clandestine qui va embarquer tout ce petit monde dans un des endroits les plus hostiles de la planète.

Vostok prend alors sa forme finale : un thriller fantastique en huis-clos dans lequel Leo suivra l’équipe d’explorateurs et de criminels qui va réveiller la station polaire endormie depuis des années. Elle y découvrira son passé, ses secrets et ses dangers, même si dame nature n’est pas la seule meurtrière du coin. Le roman met du temps à se mettre en place, mais on découvre avec fascination cet univers extrême, cadre parfait pour une histoire angoissante. On retrouve un peu l’esprit claustrophobe de certaines histoires se déroulant dans les couloirs d’un vaisseau spatial ou d’un sous-marin, où le lieu de vie est extrêmement réduit et où l’extérieur est un danger mortel.

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L’auteur nous restitue avec admiration l’histoire des scientifiques du passé, qui ont lutté avec des moyens dérisoires pour mener leurs recherches vers leur but. On ressent une fascination pour cette grande époque de la science. On connait tous la course à la conquête spatiale qu’a connu la guerre froide, et ici on est de l’autre côté mais toujours dans la même démarche, le même feeling, la recherche scientifique dans son esprit conquérant. Laurent Kloetzer fait de nombreux ponts entre le passé de la station et le présent de sa fiction, qui se renvoient la balle constamment. Le lecteur sera aussi frappé par la restitution réaliste et fidèle de tous les éléments techniques de cet environnement. On ne sera pas surpris, au détour d’une page web, d’apprendre que le monsieur est accessoirement ingénieur. Pas étonnant donc que certains passages me rappellent mon projet d’étudiant sur les outils de forage en grande profondeur (pour lequel j’ai eu une note pourrie, mais passons).

 Pour autant, le roman n’oublie pas de travailler ses personnages. Leo nous apparait comme une adolescente très convaincante, elle se cherche dans cet univers mais arrive à s’affirmer face aux adultes. Sa relation avec Juan va de l’amour profond à la peur en passant par l’admiration, ces deux-là forment un tandem extrêmement juste et touchant. Autour d’eux viennent se greffer les hommes du Cartel, les scientifiques et les explorateurs qui vont mettre en place l’expédition, des hommes qu’on ne connait pas mais que Juan va payer grassement pour venir braver les dangers de Vostok. Ça donne un casting varié et convaincant même si au début j’avais un peu de mal à trier tout ce petit monde dans ma tête.

Tout se met en place tranquillement, l’intrigue tisse sa toile efficacement pour surprendre le lecteur par quelques pirouettes bien senties. L’atmosphère oppressante et hostile de l’environnement est vraiment bien ressentie à la lecture. Derrière le côté technique et scientifique, il y a un aspect merveilleux et poétique inspiré par ce lieu, quand l’auteur nous décrit ces panoramas gelés, l’atmosphère quasi-surnaturelle de ce continent à peine effleuré par l’homme. Je regrette  seulement le côté fantastique qui permet quelques résolutions « magiques » un peu faciles de certaines situations notamment par l’intermédiaire d’Araucan et de ses capacités, même si la plupart du temps ça reste très bien dosé.

Techno-thriller en milieu arctique à l’ambiance exceptionnelle, Vostok est un roman dense, immersif, aux personnages passionnants. Il allie histoire scientifique et fiction d’anticipation avec minutie pour nous embarquer. Et maintenant il parait que je dois lire Anamnèse de Lady Star

Lire aussi l’avis de : Gromovar (Quoi de neuf sur ma pile ?), Blackwolf (Blog O Livre), Lune (un papillon dans la lune), Xapur (les lectures de Xapur), Cornwall (la prophétie des ânes),

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Cet article a 6 commentaires

  1. L'épicière

    C’est bientôt mon anniversaire, je vais souffler l’idée. Et si personne ne la prend, ce sera mon auto-cadeau.

    1. Je suis aussi un adepte de l’auto-cadeau, c’est une pratique très saine 😀

  2. Xapur

    Je confirme, tu dois lire Anamnèse 🙂

    1. Voui, je viens de le voir en poche chez Folio SF d’ailleurs, ça tombe fort bien