Sir Terry Pratchett a toujours été une figure emblématique de la fantasy, son univers décalé et foufou du Disque-monde a marqué beaucoup de lecteurs (et de joueurs). Mais j’ai toujours été un peu en dehors de ça, ayant lu La huitième couleur il y a quelques années, j’avais trouvé ça « mouais bof ». Mais de l’avis général, c’est pas le meilleur, et c’est justement ce que me disait un ami entre deux bières pendant l’apéro, en me mettant dans les mains Mortimer.
Mortimer est un pauvre jeune homme qui se retrouve par un heureux hasard (ou pas) en apprentissage chez une personne curieuse : la Mort. Question stage, on a vu plus joyeux, mais notre héros va apprendre les lois qui régissent le trépas de ses semblables, et va devoir vivre en compagnie du grand faucheur, de son presque-cuistot et de sa fille adoptive. Et évidemment, à un moment, il va merder quelque chose puisque lui est humain, déclenchant un beau bordel sur le Disque-monde.
Le texte de Pratchett, comme dans mon souvenir, est dense et très très amusant. Le regretté créateur n’avait pas son pareil pour balancer des vannes et des situations abracadabrantesques dans tous les sens. On sourit souvent et on éclate de rire de temps en temps avec ce livre entre les mains. Chaque phrase est un prétexte à un bon mot, un dialogue désopilant ou une explication farfelue sur les règles de l’univers. On décèle aussi par endroit des critiques un peu acerbes cachées entres deux répliques décalés. Et il faut souligner l’excellente traduction de Patrick Couton qui arrive à donner sens et saveur à cette avalanche de gros n’importe quoi.
Le point fort de ce tome est sans aucun doute le personnage tant acclamé de la mort, donc le caractère décalé et les répliques hilarantes surprennent toujours le lecteur. On le sent à la fois blasé et curieux, solitaire et attachant. Les dialogues entre lui et Mortimer frisent le génie absurde. On comprends vite pourquoi il est le protagoniste le plus emblématique de l’univers de l’écrivain. C’est d’ailleurs à cause de la classe absolue du grand zigouilleur que Mortimer, le supposé héros, m’est apparu fade en comparaison. Le personnage qu’on suit la plupart du temps n’a pas grande personnalité.
C’est la première raison qui a fait que, malgré toutes les qualités que contient le bouquin, j’ai eu du mal à vraiment plonger dedans. C’est un peu le même syndrome que certains livres de Neil Gaiman, le héros ressemble plus à un avatar de lecteur, servant à se promener dans le monde du roman. Et ça, j’accroche pas trop. Mon second problème avec ce roman, c’est que j’avais du mal à lire plus de 5 ou 10 pages en une fois. Le texte est tellement plein de petites vannes, de digressions marrantes, de dialogues sans queue ni tête, etc… qu’inévitablement je saturais très vite. C’est comme enchainer une saison entière de Kaamelott : quelques épisodes passent nickel, mais au bout d’un moment je décroche (ah, j’en vois déjà qui se lèvent, outrés par cette remarque).
Et c’est là une caractéristique toute personnelle, j’ai un rapport à l’humour très compliqué. Mon moi auto-critique me dit toujours que j’ai un humour de merde, mais c’est qu’un con. Le problème est que même si je trouve l’humour de Mortimer très drôle, c’est ce même humour qui m’empêche de rentrer dans l’univers, c’est marrant mais décousu, c’est rafraichissant mais hyper-dense. Je lisais parce que c’est rigolo, mais j’avais aucune envie de connaitre la suite de l’histoire, le farfelu prends le pas sur l’immersion et me laisse hors de son monde, à trainer les pieds en me demandant ce que j’ai loupé. J’aime beaucoup avoir une touche d’humour dans les livres que je lis, mais quand l’humour en est le moteur principal, j’ai plus de mal à rester accroché sur la longueur, ma lecture devient laborieuse, c’est exactement ce qui s’est passé ici.
De l’avis de beaucoup, Mortimer est une bonne porte d’entrée dans le Disque-monde de Terry Pratchett, et bien plus accrocheur que les trois livres précédents (oui, c’est le 4ème tome de la série). Effectivement on cerne bien l’univers de l’écrivain dans ce livre, son caractère et l’invitation qu’il représente vers la tripotée d’aventures qui vont suivre. Si un livre drôle et farfelu ne vous fait pas le même effet que moi (à savoir vous fait sortir de la lecture en vol plané par la fenêtre), c’est sans doute un bouquin qu’il serait bon de conseiller. Si vous êtes un ours que l’humour à outrance perd en route, il faut consulter. Oui, je sais.
Ah, je dois être un peu ours aussi alors… On a la même approche sur les romans humoristiques. Du coup, ça ne va pas me faire me précipiter sur d’autres romans du Disque-Monde ça…