Au milieu de leurs traductions de grosses saga anglophones à succès comme Les poudremages, Le livre des terres bannies ou Le livre des martyrs, Leha glisse dans son planning pas mal d’auteurices francophones, mais je m’étais jamais penché sur ce côté là de leur ligne édito (la plupart ne me disait rien, et le reste est dans ma PAL). Mais ce mois-ci est sorti La confrérie des effraies d’Éric Amon que j’ai reçu dans ma boite aux lettres flambant neuve.
Un agent de la Secrétairie du royaume de Lacustre part en mission pour démanteler une bande de malfrats de haut vol qui se fait appeler La confrérie des effraies. Après des mois de préparation, il prend le nom de Dzo et saisit une opportunité : Un membre de la confrérie est emprisonné sur le Croc, une île qui sert de prison. Dzo va devoir se faire passer pour un criminel, s’acoquiner avec le prisonnier et remonter le courant pour prendre contact avec ses complices et les infiltrer.
On va directement aborder un aspect généralement clivant, si vous n’aimez pas les styles littéraires fleuris, au langage très soutenu, passez votre chemin. L’auteur livre une narration à la première personne dans un style très prout-prout, ça donne un contraste bizarre entre l’histoire au milieu de la pègre, et la manière dont il raconte ça. Et ça aurait pu me bloquer franchement, mais au final j’ai trouvé ça marrant, on comprend bien le décalage entre notre agent infiltré érudit et son « personnage » de gros bras pas très malin, et donc tout le talent qu’il met dans son interprétation. Au final j’ai bien aimé la plume, il en fait parfois beaucoup mais c’est très agréable à lire. Autre petite touche amusante : Le narrateur nous raconte son histoire, mais il parle aussi de Dzo (lui, donc) à la troisième personne, et c’est tout bête mais ça montre un processus d’acteur qui décrit les actions de son personnage. Et j’ai trouvé ça très rigolo.
L’histoire qui nous est racontée ici est finalement très classique, c’est le trope de l’agent infiltré qu’on retrouve dans plein de films de gangsters. Ici on l’applique à un univers fantasy, ce qui est une originalité, mais une fois qu’on a fait cette transposition le reste est finalement assez prévisible. Maintenant vous me connaissez, la prévisibilité c’est pas un défaut pour moi, j’ai apprécié ma lecture parce que les personnages fonctionnent. On y va progressivement, on fait connaissance avec notre protagoniste, puis avec Corbin, et on découvre cet univers par petites touches avec juste ce qu’il faut de détails mais sans nous écraser sous 10 tonnes de worldbuilding. Après une première partie riche en rebondissements, on va vraiment faire la connaissance de toute la bande des Effraies. Si à partir de là on a un rythme un peu décousu, pendant un petit moment, on arrive à installer toute une bande de personnages secondaires avec une alchimie très convaincante, et après, il arrive des trucs, et c’est cool mais je rentre pas dans les détails.
Comme toute histoire d’agent infiltré qui se respecte, Dzo va plonger un peu trop profond dans son rôle et connaîtra le doute, on ne sait pas vers qui ira son allégeance quand les masques tomberont. Encore une fois, c’est pas inédit, mais c’est bien fait. Les liens qui s’établissent entre lui et ces malfrats de haut vol sont crédibles et se tissent sur le temps long. On prend quelques pages à chaque « épisode » pour créer du lien, fouiller des personnalités, comprendre l’autre. C’est comme ça que se construit la trame jusqu’à une dernière partie où, évidemment, tout se bouscule et on doit abattre ses cartes.
Ouais, j’ai franchement bien aimé cette lecture, Éric Amon joue avec des archétypes narratifs bien connus mais il le fait avec panache sur un One-shot qui se tient bien. Les personnages sont convaincants et donnent vie à une histoire qui se suit avec grand plaisir. Y’a du suspense, de la castagne, de belles relations. On pourra chipoter sur le registre de langage, sur quelques passages au rythme un peu flottant, mais c’est pas très grave, l’essentiel est là, et il m’a emporté.
Roman reçu en Service Presse de la part de l’éditeur, merci à eux
Lire aussi l’avis de : Laird Fumble (Le syndrome Quickson),
Couverture : William Bonhotal
Éditeur : Leha
Nombre de pages : 464
Date de sortie : 8 Juin 2023
Prix : 20€ (broché) / 9,99€ (numérique)
Je bloque sur la couverture, qui ne me plaît pas du tout
J’aime bien le style, mais j’avoue que ça reflète pas vraiment ce qu’est l’ensemble du bouquin
Ah j’avoue que comme Zina, je ne suis pas fan de la couverture. Mais votre critique me donne envie de tenter l’aventure. Le WB est « fantasy classique » ou pas ?
C’est plutôt fin de moyen-âge alors, presque renaissance, y’a des grandes cités, ça se passe pas mal en ville, y’a un peu de poudre qui pointe le bout de son nez. C’est pas « dragons et chevaliers » quoi. J’ai pensé à un univers type Dishonored, si vous connaissez ces jeux
Pas vraiment tentée, mais au moins, j’ai passé un bon moment en lisant ta chronique 😉
L’essentiel est bien là 😀
En effet !
Le côté prévisible m’ennuie un peu, mais je vais quand même noter le roman en mode « lecture de vacances », il me semble que ça passerait bien pour moi.