Nous voici de retour pour le troisième tome des aventures subtiles de Gengis Khan brillamment racontées par Conn Iggulden. Après un premier tome sur son enfance « à la dure » et un second qui voit la naissance de son empire et sa confrontation avec les peuples Jin, Temüdjin a maintenant atteint la bonne quarantaine mais il est loin de la retraite, y a encore des têtes à trancher.
Au début de La chevauchée vers l’empire, Gengis envoie ses généraux guerroyer dans à peu près toutes les directions, vers la Russie, la Chine ou la Perse. Mais du côté du Khwarezm, le Shah Mohammed rigole bien devant ces petits émissaires étrangers qui cavalent dans ses plaines ensablées. Il va exécuter les envoyés du grand Khan et ainsi déclencher sa colère, c’est tout un peuple qui va lui tomber sur le coin de la gueule. Le chef mongol va rappeler toutes ses troupes et fondre sur celui qui l’a insulté, et affronter la plus grande armée jamais rencontrée.
Plus encore que dans Le seigneur des steppes, Iggulden nous raconte les grandes batailles qui ont marqué la progression mongole. On est complètement dans un récit de guerre, on suit les combats avec plaisir, surtout grâce aux personnages extrêmement bien présentés par le roman. Maintenant que le Khan dirige une vraie nation unifiée, son entourage s’étoffe, ses fils grandissent. Dans tout ce joyeux bordel, les tensions et les amitiés naissent, et les trahisons aussi. La rivalité entre Djötchi et Djaghataï, les deux plus grands fils de Gengis, se fait de plus en plus féroce, la succession ne sera pas de tout repos.
Les généraux prennent aussi une part importante du récit, Suböteï, Kachium, Khasar, et les autres dirigent chacun un Tuman (une unité de 10 000 guerriers). On voit par leurs yeux les stratégies employées et les différents fronts des batailles, c’est en passant d’un point de vue à l’autre que l’auteur nous donne une vision d’ensemble des conflits. C’est un des tours de force du roman, nous immerger dans une guerre avec une vision claire des évènements et un attachement fort aux personnages. On est avec eux au cœur de la bataille, on ressent les moments de désespoir et d’exaltation héroïque, la fatigue extrême des chevauchées interminables et la férocité de ces cruels mongols.
Conn Iggulden se base en grande partie sur des faits historiques avérés et n’y fait que quelques entorses pour le bien du récit, des notes en fin de livre expliqueront les modifications ou incertitudes présentes dans le roman. Oui, tout ça, ça a presque réellement existé. D’ailleurs l’auteur n’essaye jamais de faire passer Gengis pour un grand héros, on assiste à des scènes de massacre pur et simple, perpétré sous le coup de la colère ou d’une simple volonté stratégique. Le Khan vivait pour soumettre ses ennemis, les écraser, réduire des cités en poussière, et il fait pas dans la dentelle. Pourtant le côté épique du récit nous emporte sans problème.
On s’attache aux personnages de l’histoire, on arrive à comprendre leurs motivations et leurs dilemmes grâce au talent de l’écrivain qui nous rappelle continuellement leur philosophie et leur manière de vivre. On plonge dans leurs coutumes et leur sens des valeurs, et les remises en question aussi. L’héritage est une des thématiques nouvelles apportées ici, les chefs s’interrogent sur le mode de vie nomade et guerrier des mongols en voyant les grandes cités qu’ils assiègent. Car ce troisième tome marque la fin de la vie du grand Khan, il commence à se poser des questions existentielles sur ce qui restera de lui, au monde et à sa descendance.
Comme je l’ai précisé dans ma chronique du premier tome, La chevauchée vers l’empire est le dernier livre de la saga traduit chez nous, pourtant elle en compte encore deux qui retracent la vie des descendants de Gengis. Choisir de ne sortir que la première trilogie se comprend, on a l’ensemble de la vie de Gengis Khan qui se tient bien toute seule, mais on est quand même très curieux de savoir ce que deviendra son peuple après la succession et les quelques pistes laissées en suspend notamment entre le nouveau Khan et Suböteï. A moins d’un coup de théâtre éditorial (Allez quoi, un petit effort ?), on se tournera vers la VO pour lire Empire of Silver et Conqueror.
La chevauchée vers l’empire marque la fin de l’épopée de Gengis Khan, une trilogie historique épique, sauvage et sanglante, passionnante à découvrir. De l’histoire racontée comme ça, j’en veux plus, on va creuser un peu dans la bibliographie de l’auteur.
Après avoir lu cet article, j’ai eu envie de me lancer dans les aventures de Gengis Khan. Je n’avais en fait jamais lu de roman dédié à un personnage qui a foulé notre terre pour de bon et j’avoue avoir crains la monotonie et la platitude d’un livre d’histoire. Que nenni !
A ce jour, je n’ai encore lu que le premier tome de la saga, « Le loup des plaines », et je viens d’attaquer le second « Le seigneur des steppes ». Vu la vitesse à laquelle je les dévore, c’en est fini la semaine prochaine !
En effet, je me suis totalement immergé dans la vie de Temüdjin : son enfance, sa famille, les épreuves difficiles auxquelles il est confronté, … La vie des tribus mongols dans les steppes est narrée avec précision et talent et on s’attache très rapidement aux personnages. Même si leur vie est dure et les steppes sans pitié, certains personnages sont pleins de noblesse et m’ont fortement inspiré. A vrai dire, même les plus vils font réfléchir !
Le roman est très bien écrit, le rythme est bien géré et on ne s’ennuie jamais. L’action succède à aux manigances politiques (et oui, même chez les mongols !) et la vie dans les steppes est dépeinte sans maquillage hollywoodien. Chacun des personnages présente beaucoup de profondeur et d’ambiguïté. Ici, point de super-hero insipide ni de princesse de château ! Un peu comme dans Game of Thrones, mieux vaut ne pas trop s’attacher aux personnages, il y a de grandes chances qu’ils meurent dans d’atroces souffrances.
Pour moi qui suis pourtant plutôt habitué à la fantasy, à la SF et aux thrillers, ce roman a été une très agréable surprise. Je recommande !
Ravi de t’avoir amené vers cette série (et surtout qu’elle t’ai plu).
J’étais un peu dans le même cas que toi mais maintenant je commence à lorgner un peu plus du côté des fictions historiques, je pense que c’est pas ma dernière incursion dans le domaine.