Le voilà, le dernier tome de Troie, cette fois-ci signé par David et Stella Gemmell car le grand monsieur nous a quitté et c’est son épouse qui a terminé le tout pour ses lecteurs pleins de tristesse. La chute des rois est donc le dernier bouquin de ce grand auteur. Pourrait-il être son meilleur ?
Les deux tomes précédents ont mis tous les acteurs en place et ont parfaitement posé toutes les pièces de ce grand échiquier, c’est maintenant le moment tant attendu, la guerre de Troie est déclarée. Du côté des défenseurs, Hélicon, Hector, Andromaque, Banoclès et Calliadès se préparent à résister à un envahisseur largement supérieur en nombre qui va leur tomber sur le coin de la gueule. Et cet ennemi, c’est le cruel Agamemnon qui a rassemblé les rois de l’ouest pour prendre la grande cité. Il a à ses côtés d’autres héros tout aussi prestigieux : Ulysse, Achille, et tous ces héros antiques auxquels l’auteur va donner vie dans ce face à face final, ce grand combat désespéré, cette guerre mythique.
Le couple Gemmell continue évidemment sur la lancée des deux premiers tomes, mêlant les grands enjeux politiques de la cité aux caractères et aux soucis de chacun des personnages qui se débattent dans ce bouillon. Dans cette trilogie, l’écrivain à construit une trame exceptionnelle, et on a le plaisir de découvrir des personnages forts et attachants des deux côtés des grands murs de Troie. Il n’y a pas forcément de bon et de mauvais camp dans cette guerre, chaque héros a une raison de se retrouver dans le camp qu’il défend et le lecteur se surprend à aimer autant un camp que l’autre à travers ces personnages magnifiques. On assiste à une vraie grande tragédie, on vit cette guerre aux côtés de personnages écrasés par le rouleau compresseur du destin qui, lui, ne fait pas dans le détail.
On est toujours bluffés par la construction exemplaire du récit, d’un point de vue purement mécanique, on suit la logique des évènements avec une fluidité confondante et les pièces de ce grand jeu bougent naturellement sous nos yeux. Les enjeux politiques et personnels se mélangent et forment une trame dense et passionnante à suivre. Les victoires, les défaites et les coups du sorts s’enchainent et captivent notre imagination. On est pris dans le destins de ces nombreux personnages, on les suit, on souffre avec eux, on combat avec eux, on gagne et on perd avec eux.
Ces personnages, justement, sont encore une fois passionnants. Chacun est incarné avec une telle perfection qu’on a bien du mal à choisir lequel on préfère, tous les héros de cette épopée son parfaitement caractérisés et provoquent l’empathie du lecteur. On retrouve Hector, Hélicon et Andromaque, trio tragique déchiré par les circonstances mais qui gardent leur force et leur grandeur devant la guerre. En face on retrouve l’inoubliable Ulysse, roi conteur amer amoureux, et le grand Achille, condensé de rage et de talent. Ces grands personnages resteront inoubliables parmi tant d’autres héros moins imposants mais tout aussi forts qu’on va croiser un peu partout dans ces pages, que ce soit Patrocle, Scorpios, Xander, l’époustouflant Banoclès et son ami Calliadès. Il y en a tant, et aucun n’est mal traité par le récit, tous ont leur place et leur grandeur.
Il est aussi amusant de voir comment David Gemmell joue avec le mythe, réinterprétant les évènements de l’Iliade pour les inscrire à son histoire, en gardant la force des grandes lignes originales mais en les remodelant, les tordant pour y apporter son souffle. Il reste également le maitre de l’action, évidemment. Les grandes batailles et les combats s’enchainent et marquent, les uns après les autres, on garde en tête chaque épisode épique. Le sauvetage de Pénélope, le duel Hector contre Achille, la sortie de la baie par la flotte troyenne, l’embuscade de la caravane par la cavalerie d’Hector, ou bien sûr l’épisode du célèbre cheval de Troie. Tant de moments mémorables. Tant de raisons d’aimer ce bouquin… Il est aussi amusant de remarquer la symétrie dans la carrière de l’auteur, il avait commencé sa bibliographie par Légende, le siège désespéré de la forteresse de Dros Delnoch par les hordes Nadir, et voilà qu’elle se conclut par le siège d’une autre cité, encore plus mythique, encore plus marquante, encore plus aboutie, la boucle est bouclée de manière magistrale.
La chute des rois, et la trilogie Troie par extension, est un monument de littérature épique. Des personnages marquants, une intrigue solide, de l’action et du drame à un rythme implacable. C’est du pur Gemmell, mais qui prend une nouvelle dimension pour sa toute dernière œuvre. Il nous a offert sa plus grande aventure avant d’emprunter la route ténébreuse.
J’ai lu l’Illiade d’Homère il y a un paquet de temps maintenant. Je me demande si je ne devrais pas m’y plonger de nouveau avant d’entamer celui de Gemmel. Oui, car, je suis convaincue depuis ta première chronique que c’est un livre à LIRE.
Superbe critique, je me suis régalée à la lire, et il me tarde de découvrir Gemmel!
Merci
Merci !
Connaitre l’Iliade apporte un petit plus en voyant comment Gemmell a détourné certains épisodes de l’histoire originale, mais de lointains souvenirs m’ont suffi pour ma part, je me souvenais des grandes lignes (je l’ai lu y’a 10-15 ans)
Je crois l’avoir déjà dit, mais maintenant que ce cycle est sorti en poche, plus de raisons de se priver. Et c’est valable pour moi aussi d’ailleurs (je veux dire par là que je ne dois pas me priver de ce cycle, pas que je sors en poche, hein ! 😀 ).
On devrait tous avoir un lorhkan de poche XD
Bonjour,
À lire : « Le Fil de Pénélope » d’Emmanuel d’Hooghvorst (Beya Editions), Remarquable interprétation de l’Odyssée !
Cordialement
Merci pour cette recommandation, je ne connaissais pas du tout