J’ai acheté Les 81 frères de Romain D’huissier sur un coup de tête, pour une seule raison : La couverture supra-classe avec sa reliure toilée et l’illustration de Xavier Collette qui m’a propulsé dans mes souvenirs de Shadowrun. Bon, j’ai un peu lu le résumé aussi, je suis impulsif mais quand même…
Ce premier tome des Chroniques de l’étrange nous présente le personnage de Johnny Kwan, un « fat si » qui opère à Hong-Kong. Ça ne veut pas dire qu’il est obèse au conditionnel, mais simplement que c’est un exorciste. Le lendemain d’une mission éprouvante, Johnny est engagé par le richissime Anthony Chau pour retrouver des manuscrits antiques de sa collection personnelle qui ont été dérobés dans des circonstances bizarroïdes et un peu sanglantes. Dans la même journée, notre ghostbuster apprends également le décès de son mentor Eric Tse, une pointure dans leur domaine, assassiné par un simple voleur tout ce qu’il y a de plus humain. Ou peut-être pas ?
Quand je dis que notre héros est exorciste c’est pas « soutane, eau bénite et crucifix », l’auteur a le bon goût de nous faire découvrir à travers son roman une mythologie taoïste qui va donner un petit coup de neuf à l’urban-fantasy dominée par les bestioles bien de chez nous. Johnny va donc arpenter un monde caché, peuplé de fantômes chinois, d’esprit-serpents, de spiritualité asiatique et de talismans protecteurs. C’est cet univers exotique qui est la première grande qualité du roman, on sent que Romain D’Huissier est passionné par la chose et retranscrit une ambiance à la fois très urbaine et très spirituelle, à l’image des grandes villes asiatiques contemporaines. Le rapport au surnaturel est ainsi très respectueux des traditions, l’auteur traite les esprits avec une certaine douceur.
Dans la forme, le roman est assez classique. Le héros est narrateur et va nous balader dans son monde, nous en donnant les clés de lecture principales comme s’il s’adressait directement au lecteur. C’est appréciable parce que ça nous permet de bien nous immerger dans cet univers qu’on connait très peu, ça aurait peut-être été plus dispensable si le gars nous avait expliqué qu’un vampire avait des dents pointues et n’aimait pas le soleil mais là, j’avoue que c’est pas superflu. En soi, la trame est bien dans les canons du genre : Ambiance urbaine, monde caché sous notre nez où évoluent des créatures surnaturelles, équilibre séculaire en danger, héros qui agit à la frontière des deux mondes, etc…
C’est surtout cet univers exotique qui attise la curiosité et l’intérêt tout au long de la lecture (pour moi du moins, je suppose que les asiatiques ou les passionnés de ces cultures en connaissent déjà quelques principes). Mais on a aussi une histoire très efficace en soi, archi-classique mais qui se suit avec grand plaisir. On part d’une enquête de routine qui va dévoiler couche après couche des enjeux plus importants. Le héros Johnny Kwan est convaincant, il nous apparait comme un exorciste compétent mais sensible qui comprend toute la subtilité de l’équilibre entre les deux mondes. On est loin du cow-boy qui va défoncer le dentier de tout ce qui est un peu surnaturel dans sa ville, l’enjeu est de comprendre ce à quoi on a affaire avant de foncer dans le tas, on sent que le combat n’est vraiment qu’en dernier recours.
Mais ça ne veut pas dire qu’on oublie l’action, on a droit à quelques scènes de baston mémorables qui mélangent kung-fu et gunfights dans la plus pure tradition des films de Hong-Kong. Ajoutez-y de la magie pour faire bonne mesure et vous obtenez un roman dynamique très divertissant. Le récit gagne en puissance au fur et à mesure pour nous faire vivre des combats de plus en plus dangereux et explosifs, mais il arrive quand même à conserver le côté vulnérable de son héros, on ne tombe jamais dans le « bad-ass ultra-puissant qui gagne toujours ». Romain D’Huissier n’épargne pas son héros, Johnny Kwan en prend vraiment plein la gueule et surmonte les épreuves grâce à un mélange de préparation, d’astuce et de (beaucoup de) chance.
Les 81 frères est un très bon roman qui nous fait découvrir une mythologie asiatique dépaysante. Il y a de l’action, de la magie, des personnages cools et j’ai hâte de découvrir la suite de la série, en espérant que l’auteur nous surprenne un poil plus dans son intrigue.
Lire aussi l’avis de : Blackwolf (Blog-o-livre), Joyeux-Drille (Appuyez sur la touche lecture), Gilthanas (Elbakin),
Pour le plaisir, il y a l’illustration complète de la couverture de Xavier Collette sur le blog de l’auteur.
Merci beaucoup pour cette gentille critique !
Rendez-vous pour la suite dès octobre.
Rendez-vous noté, je le lirai avec plaisir !
Merci d’avoir partagé cette critique, ça donne envie – justement vu qu’il était sélectionné par le festival Imaginales, je me demandais quoi en penser, alors ça tombe très bien !
De rien ! J’étais en train de le lire quand ils ont annoncé les finalistes, je suis à la pointe de l’actu avant qu’elle sorte 🙂
Belle critique et belle découverte (et c’est vrai que la couv’ est mons-tru-eu-se) ! D’après ce que tu en dis, ce roman me rappelle assez L’inspecteur Zhen et la traite des âmes de Liz Williams.
Connait pas, mais ça m’intrigue !