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Le camp, mélange des genres

Il y a des bouquins comme ça, même quand on le finit, on sait toujours pas bien si on a aimé ou pas. Le camp de Christophe Nicolas l’a bien cherché, c’est lui qui passe son temps à essayer de paumer son lecteur dans tous les sens.

Quelque part dans la campagne autour de Montpellier, un corps est retrouvé dans les bois. Nu, blafard, d’une maigreur effrayante, un anneau de métal étrange autour du cou, il s’est manifestement enfui du camp militaire à proximité, une piste à aborder avec tact pour le gendarme chargé de l’enquête. Six ans plus tard, Flora emménage dans le hameau de La Draille, non loin. Son pote Cyril l’aide à trimballer ses affaires mais le lendemain, tous les habitants du lieu-dit ont mystérieusement disparu. Marie, la femme de Cyril qui doit les rejoindre, trouve toutes les maisons ouvertes et désertées. Où qu’ils sont ? Pourquoi les lits sont défaits et les portes grandes ouvertes ? C’est quoi le rapport avec monsieur maigrichon ?

Le camp est un bouquin qui ressemble à un gros fourre-tout à première vue. Ça commence comme un thriller de Jean-Christophe Grangé, quelques pages plus tard ça devient Lost, pour ensuite se transformer en Cube, puis on vire dans un mix entre X-Files,  The last of us et Dreamcatcher. J’en oublie certainement d’autres, c’est juste pour visualiser un peu le gros gloubiboulga d’influences et de genres auquel on est confronté. Ceux qui s’attendaient à un thriller pur (compréhensible quand on voit la couverture et le résumé qui vendent ça comme tel) tomberont de haut et ça plaira pas à tout le monde. Pour ma part ce n’est pas forcément un soucis, l’imaginaire c’est bon, mangez-en. Par contre, ce qui frappe à la lecture c’est cette sensation de déjà-vu constante qui ne nous lâche pas au fil des pages. Le groupe de gens qui disparait mystérieusement ? On connait. Le huis-clos où les héros sont enfermés dans une boite ? On connait. L’armée qui cache des choses dans sa base super-secrète ? On connait aussi. Et là je ne parle que de ce qui est au début pour pas spoiler, mais c’est constant. Le seul truc qui apporte un peu de fraicheur est le côté campagnard français, le fantastique qui se manifeste dans un bon vieux village de chez nous est assez marrant. C’est pas complètement inédit mais ça nous change des bourgades américaines.

Le camp est donc un patchwork géant de références et de situations connues, mais est-ce que l’ensemble fonctionne ? Les personnages sont bien mis en places et agréables à suivre. On s’attache à ces gens paumés au milieu d’un truc aberrant qui les dépasse complètement. La quête de Cyril et Marie pour se retrouver dans cet univers apocalyptique est touchante et marche vraiment bien (même si ils subissent beaucoup l’histoire). Marie est parfois très énervante avec ses clopes mais ça passe encore. L’aura de mystère qui plane sur tout ça est efficace et tient le lecteur en haleine sans problème, d’autant plus que l’écriture est vive et dynamique. Le roman est découpé en chapitres courts et alterne les points de vue sans baisse de tempo comme un bon page-turner. C’est rythmé comme tout bon thriller qui se respecte et j’ai lu les 400 pages en deux jours.

Mais à un moment, trop de mystère tue le mystère. L’auteur nous envoie sur plein de pistes différentes (Surnaturels ? Aliens ? Expériences de l’armée ? Complot ? Catastrophe naturelle ? Abus de substances illicites ? Tortues ninjas ?) sans jamais donner d’indice qui va dans une direction ou l’autre. Arrivé à 95% de la lecture on ne comprend toujours rien et c’est les dix dernières pages qui nous expliquent le pourquoi du comment plutôt maladroitement : C’est un gars qui raconte au groupe de protagonistes toute l’histoire en reliant les pistes éparpillées. Voilà. Mystère résolu. Quand j’ai dit que j’étais intéressé par ce roman, on (je crois que c’était Lune) m’a dit « attention, faut bien suspendre ton incrédulité » et elle avait pas tort. Si tu veux lire Le camp, ton incrédulité tu la fous en orbite parce que ça va chercher loin. L’explication se tient plus ou moins (à quelques détails près mais on va pas spoiler non plus) et arrive à rendre le tout cohérent, mais il n’y a aucune progression dans la compréhension de l’intrigue, par les héros ou par les lecteurs. On s’amuse à nous promener dans des situations flippantes, mystérieuses et invraisemblables sans jamais nous donner la satisfaction d’une piste solide jusqu’à la fin. Comme ça part clairement dans tous les sens, au bout d’un moment on arrête juste d’essayer d’y piger quelque chose et on se laisse trainer par l’histoire.

Grosse soupe à base de Lost, X-Files, et tous ces trucs de mystères, complots et surnaturel, Le camp reste une lecture agréable, rapide et fun. Mais quand même, ça ressemble à un gros amalgame de trucs déjà vus, et l’histoire se finit de manière un peu brusque sans avoir eu la politesse d’amener son lecteur sur le chemin de la compréhension par lui-même.

Bouquin reçu en Service Presse de la part de Pocket, merci à eux

Lire aussi l’avis de : Lune (Un papillon dans la lune), Le chien critique,

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Cet article a 3 commentaires

  1. Lutin82

    Tu confirmes mon impression épidermique : ce n’est pas pour moi. J’arrive à mettre mon incrédulité en orbite mais peut-être pas au niveau de la Lune…

      1. Lutin82

        Oui!!! Cela fait un peu loin…