You are currently viewing Star Ouest, Pour une (grosse) poignée de nouvelles

Star Ouest, Pour une (grosse) poignée de nouvelles

Le western, pour moi c’est un des genres les plus casse-gueules. C’est vrai que cet univers a une aura vraiment à part et une puissance évocatrice  exceptionnelle, mais il est peut-être un des plus codifiés, pleins d’archétypes dans tous les sens, tellement présents dans notre imaginaire collectif qu’il faut un grand mastodonte de la narration pour arriver à sortir une histoire de cet amas de clichés et de références entassés dans un coin de notre culture.

Pourtant chez Imajn’ère, a pas peur. Quand fut venu le temps de concocter leur anthologie annuelle de nouvelles à l’occasion du salon qu’ils organisent en avril à Angers (fier pays de la boquette), ils ont choisit comme thème le western. Mais pas question de se limiter, ici on pense large, le far west spatial, le far west classique, le far ouest breton (?), le far west martien, on tire dans tous les coins et attention à pas laisser trainer sa chope sur le comptoir. J’ai reçu ce recueil par l’intermédiaire de l’ami Dionysos que je remercie. Cela va sans dire, mais j’le dis quand même, comme tout recueil de nouvelles on n’accrochera pas à tout.

Sans contenir d’immondes bouses de bison fumées, l’anthologie contient pas mal de nouvelles agréables à lire mais pas vraiment mémorables, qui sentent le bon cliché des familles. Y’a des saloons qui puent, des pistoleros vengeurs, des shérifs, des brigands, des indiens, bref, toute la panoplie OK Corral est de sortie. Ainsi, les deux premières histoires (Juarez 1911, de Marc Villard et Du grabuge sur Montana de Romuald Herbreteau) ne surprendront pas vraiment mais posent leur ambiance avec un certain soin. C’est à la troisième que j’ai croisé la première proposition enthousiasmante, Mosquito Toast de Jeanne-A Debats nous raconte la chasse d’un Vampire poursuivant un de ses congénères en plein désert, cette nouvelle trouve un ton à elle et mélange habilement vampirisme et cow-boyisme. J’ai seulement failli déchirer le bouquin (mais bon, c’est dur, déchirer un livre, quand même…) en me rendant compte que l’histoire virait dans le travers purement horripilant du vampire sexué prout-prout à dentelles qui boit du sang dans un verre à pied, qu’est-ce que cette image m’énerve, je te hais, Anne Rice !

Voilà, on est lancés, je vais pas vous faire la vingtaine de nouvelles par le menu mais le livre recèle de vraies bonnes surprises, à commencer par Regarde au coin de la rue, fiston, si le clebs à trois pattes cavale à reculons de Justin Hurle. Rien que le titre m’a fait rire, je dois l’avouer… Mais cette histoire de bouseux sur un chantier de chemin de fer (classique, encore une fois) ressort par son côté décalé et un peu absurde qui marche vraiment bien. Les nouvelles suivantes sont plaisantes, on passe un moment agréable et les fan de westerns  seront clairement dans leurs petits souliers même si certains récits, encore une fois, n’arrivent pas à se dépêtrer des archétypes qui collent au genre.

Quelques autres histoires ressortent du lot, et justifient la lecture de ce recueil à elles seules. Ainsi, Les marionnettes de la mort d’Irène Maubreuil & Robert Darvel propose une histoire de vengeance vraiment originale et surtout une ambiance géniale qui frappe par son côté visuel fort. Inadaptée, de Jérôme Verschueren, tape dans le western futuriste où l’aspect désert et crépusculaire vient du fait que les humains se sont tous entassés dans le cloud, laissant le vrai monde (le triste, là, avec les trucs physiques dedans…) aux quelques personnes ne pouvant pas les rejoindre. Enfin, ma petite préférence perso, Duel à Keralam de Jérôme Nédélec transpose habilement les codes du western dans la Bretagne du IXe siècle, pose une ambiance propre et nous livre une nouvelle vraiment épatante.

Côté visuel, le bouquin est parsemé de petites illustrations encrées de Gérard Berthelot, Grégor et Philippe Caza (oui, quand même…). Ce côté BD old-school apporte une touche très chouette au bouquin et ponctue les nouvelles de manière vraiment sympa. Le seul gros bémol visuel est la couverture que je trouve assez horrible, un fouillis un peu placé n’importe comment (oh, Roland de Gilead…), pas de perspective ni d’ouverture, des anatomies douteuses, une couleur jaune/ocre sur un fond parchemin bien dégueu. Apparemment c’est une pointure de l’illustration qu’a fait ça, Gilles Francescano, mais j’ose espérer que c’est pas son meilleur boulot…

Mais à part ça, l’anthologie d’ImaJn’ère vaut le détour, elle a une bonne cohérence (un exploit dans le domaine) et une qualité d’ensemble vraiment honorable, dont les quelques faiblesses sont compensées par de vraies bonnes grosses pépites et sans vrai gros ratage (à part la couv’ ?). Je suis pas toujours bon client du format nouvelle et pas forcément fan absolu de western, mais pourtant j’ai passé quelques vrais bons moments de lecture avec ce Star Ouest, que vous pourrez vous procurer par ici si la lecture vous intéresse.

Lire aussi l’avis de : BlackWolf (Blog-O-livre), Lorkhan

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

Cet article a 6 commentaires

  1. Dionysos

    Tiens, oui, jusque là les retours sur la couv’ de Gilles Francescano n’étaient pas mauvais, tu ouvres la voie 🙂

    1. JP

      Oui, pis j’y vais pas avec le dos de la fourchette 😀

      1. Dionysos

        Et c’est très bien ainsi, autant être honnête 🙂

  2. Justin Hurle

    Merci pour cette chronique. Mais surtout, d’avoir lu ce recueil. 🙂

    1. JP

      De rien, super boulot sur la nouvelle 😀

  3. Pierre Marie Soncarrieu

    Bonjour, Ci joins l’émission littéraire d’imaJn’ère. Vers la fin, le débat sur ce qui fait diférence entre critique et chronique fait débat au sein de notre association. Je vous invite à écouter et vous donne tribune pour y répondre si vous le souhaitez. Cordialement. http://www.radio-g.fr/content/imajn-re-06-09-2016